9 L’ancienne clinique gynécologique

L’ancienne clinique gynécologique
L’ancienne clinique gynécologique, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
La clinique gynécologique, 1961, photographes : probablement les frères Metz, droits : Archives municipales de Tübingen
La clinique gynécologique, 1961, photographes : probablement les frères Metz, droits : Archives municipales de Tübingen
Maison de la corporation étudiante Rothenburg, Schlossbergstrasse 23
Maison de la corporation étudiante Rothenburg, Schlossbergstrasse 23, carte postale des frères Metz, droits : Haus der Geschichte Baden-Württemberg

9 L’ancienne clinique gynécologique

Schleichstraße 4–8, 72076 Tübingen

En 1945, de nombreuses femmes violées par des soldats français se firent examiner dans la clinique gynécologique.

De nombreuses Tubingeoises furent violées par des soldats français, en particulier dans les premiers jours qui suivirent l’invasion. Une femme témoigne : « Partout à Tübingen, on entendait des femmes et des jeunes filles crier à l’aide. Nous étions toutes terrifiées. » Beaucoup de femmes se cachèrent durant des jours. Quelques-unes se défendirent courageusement. Le bilan resta malgré tout effrayant. Entre mai et septembre 1945, 977 victimes de violences sexuelles se firent examiner dans la clinique gynécologique de Tübingen dont presque 400 habitantes de la commune. Deux tiers d’entre elles s’étaient fait violer entre le 19 avril et le 8 mai. Ces femmes venaient se faire examiner par peur des maladies vénériennes ou parce qu’elles étaient enceintes. Il est difficile d’estimer le nombre de femmes qui n’ont rien dit ou qui se sont fait examiner ailleurs.

Les violences sexuelles sont un phénomène fréquent en période de guerre, qui s’est produit presque partout en Allemagne lors de l’invasion des Alliés. Des soldats allemands également violèrent des millions de femmes au cours de la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, de nombreux Tubingeois ont perçu cette violence comme étant une caractéristique inhérente aux occupants français et à leurs troupes coloniales. Dans un contexte de censure de la presse, les prophéties apocalyptiques de la propagande national-socialiste, les faits réels et les rumeurs se mêlèrent à l’image caricaturale et raciste du violeur « marocain ». Fait particulièrement révélateur, la couleur de peau des coupables était décisive pour décider si une femme pouvait avorter ou non. Ce critère servait au médecin lorsqu’il prenait une décision au nom des autorités municipales. Ceci a pu inciter les victimes de viol à désigner les soldats coloniaux comme coupables. Quelques « enfants de guerre » furent probablement inhumés dans le cimetière militaire français.

Certes, les violeurs étaient menacés de peine de mort. Mais tant que la guerre n’était pas encore finie et que l’administration militaire n’était pas établie solidement, il était difficile d’attraper les coupables. Pour contenir les actes de violence, les forces d’occupation firent pression pour que soient installées ce que l’on appelait des maisons de tolérance. Des femmes s’y prostituaient pour les soldats d’occupation en principe « sans se sentir forcées ». En France, jusqu’en 1946, les maisons de tolérance étaient encore une pratique courante, régulée par la loi. Elles devaient permettre de contrôler les prostituées et d’éviter que des maladies vénériennes ne se répandent. L’un de ces bordels s’est brièvement trouvé dans la maison de la corporation étudiante Rothenburg sur le Schloßberg. Toutefois, les Tubingeois ne virent pas la présence de ces maisons comme un moyen d’éviter davantage de viols, mais comme une atteinte à leur morale bourgeoise.

Johannes Großmann

Pour plus d’informations

Elke Gaugele, « Nun sollten wir zu spüren bekommen, was Erobertwerden heißt ». Erfahrungen von Frauen im Landkreis Tübingen beim Einmarsch der französischen Besatzungstruppen, in : Tübinger Blätter 82 (1996), p. 28–32.

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