Category Archives: La ville universitaire

La ville universitaire

15 L’hôpital militaire Auf dem Sand

L’ancien hôpital du quartier Sand
L’ancien hôpital du quartier Sand, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
L’ancien hôpital du quartier Sand, vue de l’Österberg
L’ancien hôpital du quartier Sand, vue de l’Österberg, photographes : frères Metz, droits : Haus der Geschichte Baden-Württemberg
L’église orthodoxe roumaine St. Georg
L’église orthodoxe roumaine St. Georg, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte

15 L’hôpital militaire Auf dem Sand

Drosselweg 10, 72076 Tübingen

L’ancien hôpital Auf dem Sand de la Wehrmacht fut utilisé comme hôpital militaire français jusqu’en 1982.

Dans le cadre de préparatifs secrets à la guerre, la Wehrmacht construisit un hôpital militaire entre 1937 et 1940. Celui-ci se trouvait sur la colline du Denzenberg dans le quartier de Lustnau. Ce long bâtiment jaune, construit d’après les plans de Hans Herkommer, dominait la ville, marquant ainsi le paysage urbain de Tübingen. Lors de la Seconde Guerre mondiale, cet hôpital fut le lieu de travail de Theodor Dobler. Cet homme très respecté, que l’on nomma plus tard le « sauveur de la ville de Tübingen », travaillait dans des conditions très difficiles au sein d’un hôpital surpeuplé.

Après la fin de la guerre, l’armée d’occupation française installa à son tour un hôpital militaire dans ces bâtiments modernes qui prit le nom d’hôpital Émile Roux. Sur le même site, le 10 mars 1946, la maison de repos pour les blessés graves de la guerre entra en service sous la direction de Theodor Dobler. C’était un établissement de premier plan à l’échelle nationale pour le traitement des lésions cérébrales. Les Français utilisaient l’aile gauche du bâtiment (vu de la vallée), les Allemands l’aile droite. Dans les années 1950, on créa à proximité immédiate le lotissement Eberhard Wildermuth pour les personnes expulsées des territoires allemands perdus en 1945 et pour les Tubingeois dont les logements avaient été confisqués par les Français.

Lorsque l’hôpital français ferma en 1982, la Bundeswehr s’installa dans le bâtiment. En 1986, la maison de repos fut fermée définitivement. Dès 1990, une partie de la faculté d’informatique Wilhelm Schickard de l’Université de Tübingen s’y installa. Aujourd’hui, le bâtiment accueille également les facultés d’astronomie et de criminologie. La chapelle de l’hôpital, construite en 1946, est utilisée aujourd’hui comme lieu de culte par la paroisse orthodoxe roumaine St. Georg.

Jonathan Schilling

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Theodor Dobler
Theodor Dobler, photographie prêtée par la famille Dobler

Theodor Dobler (1893–1973) était médecin du service de santé militaire à Tübingen. Avec d’autres personnes, il refusa d’obéir à l’appel à résister coûte que coûte. C’est d’ailleurs en partie grâce à son rôle déterminant que Tübingen resta épargnée des dommages de la guerre et fut livrée à l’armée française sans combat. Dès 1945, une rue de Tübingen sur l’Österberg prit son nom. À partir de 1946, il dirigea la maison de repos Auf dem Sand. (F.R.)


14 Le Leibniz Kolleg

Le Leibniz Kolleg, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
Le Leibniz Kolleg, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
Des étudiants dans le Leibniz Kolleg, 1954, photographe : Kleinfeldt, droits : Archives municipales de Tübingen
Des étudiants dans le Leibniz Kolleg, 1954, photographe : Kleinfeldt, droits : Archives municipales de Tübingen
L’ancienne Deutsche Burse, devenue depuis 1948 le Leibniz Kolleg
L’ancienne Deutsche Burse, devenue depuis 1948 le Leibniz Kolleg, photographe : Kleinfeldt, droits : Archives municipales de Tübingen

14 Le Leibniz Kolleg

Brunnenstraße 34, 72074 Tübingen

Le Leibniz Kolleg préparait de jeunes bacheliers à des études supérieures en suivant l’un des principes de la politique de rééducation française : démocratiser à travers l’éducation.

Le Leibniz Kolleg, internat interdisciplinaire, fut créé en 1948. Il s’installa dans la Deutsche Burse construit par Paul Schmitthenner en 1928, un foyer pour les Allemands originaires des territoires de l’Est perdus en 1918. Aujourd’hui, le Leibniz Kolleg propose aux bacheliers indécis d’étudier différentes matières. Mais cette idée n’est apparue qu’au début des années 1950. Au cours des premières années, le Leibniz Kolleg avait une autre mission : élargir l’horizon intellectuel et préparer à un cursus plus spécialisé les personnes qui n’avaient pas encore pu s’inscrire à l’université mais faisaient preuve de qualités exceptionnelles.

Le gouvernement militaire français soutint la mise en place du Leibniz Kolleg, qu’il voyait comme une réponse à l’échec de l’éducation et des sciences sous le national-socialisme. La maison dispensait des cours et était administrée par les étudiants eux-mêmes ; elle visait ainsi à former les jeunes gens au libre-arbitre et à leur transmettre des valeurs démocratiques comme la tolérance, la liberté, le courage d’exprimer ses opinions et le courage civique. Le Leibniz Kolleg, en tant qu’instrument de rééducation, était censé avoir des effets directs sur l’université et contribuer à la naissance d’une nouvelle classe dirigeante politique et intellectuelle en Allemagne qui plaiderait pour une compréhension entre la France et l’Allemagne.

Dans la période d’après-guerre, des institutions similaires naquirent dans d’autres villes allemandes, comme le Collegium Academicum à Heidelberg. Ayant été réintégré dans l’administration centrale de l’Université de Tübingen en 2016, le Leibniz Kolleg de Tübingen est l’une des seules institutions de ce type encore existantes à ce jour.

Andreea Minca

Pour plus d’informations

Michael Behal (dir.), Studium generale, studium sociale. Das Leibniz-Kolleg 1948–1998, Tübingen, Leibniz Kolleg, 1998.

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13 Le commandement militaire régional

Wilhelmstraße 24
Wilhelmstraße 24, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
Le commandement militaire français de l’arrondissement, Wilhelmstraße 24, octobre 1945
Le commandement militaire français de l’arrondissement, Wilhelmstraße 24, octobre 1945, photographes : frères Metz, droits : Haus der Geschichte Baden-Württemberg
Bâtiment de la direction locale du parti national-socialiste avec des drapeaux aux croix gammées
Bâtiment de la direction locale du parti national-socialiste avec des drapeaux aux croix gammées, Wilhelmstraße 24, photographe : Eugen Rühle, droits : Archives municipales de Tübingen

13 Le commandement militaire régional

Wilhelmstraße 24, 72074 Tübingen

L’ancien siège de la direction régionale du parti national-socialiste devint le siège du gouverneur militaire français pour l’arrondissement de Tübingen.

Jusqu’en avril 1945, le bâtiment situé à la Wilhelmstraße 24 avait accueilli la direction locale du parti national-socialiste. Pendant la période d’occupation, il servit de siège au commandement militaire français pour l’arrondissement de Tübingen. Le gouvernement militaire entendait exercer un contrôle strict sur les administrations allemandes, y compris aux niveaux les plus bas de la hiérarchie. Pour les autorités militaires, le contrôle principal s’exerçait au niveau des arrondissements. Les commandants d’arrondissement ou « délégués du cercle » étaient donc particulièrement importants. La tâche qui leur incombait était de contrôler les Landräte allemands (représentants des arrondissements). Ils recueillaient des informations, observaient l’état d’esprit de la population allemande et veillaient à ce que les instructions du gouvernement militaire soient appliquées. En outre, ils exerçaient des fonctions de représentation, se rendaient aux séances des conseils municipaux et prenaient part à la vie de la société. De par leurs contacts réguliers avec diverses instances et représentants allemands, les délégués du cercle avaient une certaine compréhension des problèmes urgents touchant la population locale. Souvent, ils défendaient les intérêts locaux auprès des membres plus haut placés dans la hiérarchie du gouvernement militaire et pointaient avec fermeté les problèmes et les erreurs de parcours. Leur travail a été en général reconnu et estimé, également de la part des Allemands. Ainsi, par leur rôle de médiateur, les délégués du cercle ont joué un rôle important dans le rapprochement entre les peuples français et allemand.

Les titulaires de cette fonction à Tübingen furent nombreux. Le mandat le plus long fut celui du colonel Henri Brochu, d’août 1947 à décembre 1950. À son départ, on pouvait lire dans le Schwäbisches Tagblatt : « C’est un ami qui s’en va ». Leur mission se termine avec la fin du statut d’occupation. À la Wilhelmstraße 24 se trouve désormais l’Ordnungsamt de la ville de Tübingen (service administratif en charge des questions d’ordre et de sécurité publique).

Lukas Kuhn

Pour plus d’informations

Wolfgang Sannwald, « Trikolore, Kreisgouverneur und kahle Wälder. Die französische Militärverwaltung und der Landkreis Tübingen », in : idem (dir.), Persilschein, Käferkauf und Ab-schlachtprämie. Von Besatzern, Wirtschaftswunder und Reformen im Landkreis Tübingen, Tübingen, Verlag Schwäbisches Tagblatt, 1998, p. 41–60.

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Henri Brochu, vers 1950
Henri Brochu, vers 1950, détail d’une photo, photographe : Alfred Göhner, droits : Archives municipales de Tübingen

Henri Brochu fut gouverneur en charge du district de Tübingen de 1947 à 1950. Il cultivait de bonnes relations avec la population locale et défendait une étroite collaboration entre les Allemands et les Français. On lui sait gré de son engagement pour ses administrés lors de la pénurie alimentaire de 1947. (F.R/ P.H)

12 Le Kunstgebäude

Bâtiment d’archéologie ancienne
Bâtiment d’archéologie ancienne, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
L’entrée du Kunstgebäude de Tübingen Wilhelmstraße, 1946
L’entrée du Kunstgebäude de Tübingen Wilhelmstraße, 1946, photographe : Carl Näher, droits : Archives municipales de Reutlingen
Affiche pour l’exposition « Chefs d‘œuvre retrouvés »
Affiche pour l’exposition « Chefs d‘œuvre retrouvés » dans le Kunstgebäude, du 22 septembre au 1er décembre 1946, droits : Archives municipales de Tübingen

12 Le Kunstgebäude

Wilhelmstraße 9, 72074 Tübingen

Le Kunstgebäude, situé dans le bâtiment de l’ancienne collection des Antiquités, était une vitrine de la politique culturelle en zone d’occupation française pendant les années d’après-guerre.

Le bâtiment néo-classique d’archéologie ancienne, achevé en 1846, fut planifié en même temps que la Neue Aula. Il fut aménagé et agrandi à plusieurs reprises à partir des années 1870. Avant la Seconde Guerre mondiale, il accueillit l’institut de l’hygiène et la collection antique de la faculté d’archéologie. Pendant la guerre, des travailleurs forcés polonais, russes et probablement aussi français furent retenus prisonniers dans ses sous-sols.

Après la guerre, cet endroit devint pendant une courte période un lieu phare pour les Beaux-Arts. De l’automne 1945 au printemps 1949, le Kunstgebäude présenta un total de 23 expositions qui attirèrent environ 110 000 visiteurs. Ces derniers y virent la première exposition Otto Dix présentée en Allemagne depuis 1930, ainsi que les œuvres d’artistes allemands représentants de l’art moderne. C’est toutefois l’exposition « chefs d’œuvres des musées de Cologne et de la Staatsgalerie de Stuttgart », qui remporta le plus grand succès avec ses 42 000 visiteurs durant six mois. Les pièces exposées, issues de neuf siècles d’histoire de l’art, avaient été évacuées vers le sud du Wurtemberg pour les protéger des dommages de la guerre. C’est ainsi que l’exposition put voir le jour. Avec le théâtre, le cinéma et la musique, les Beaux-Arts devinrent l’une des préoccupations majeures de la politique culturelle à Tübingen. La Kunsthalle et son administrateur Gustav Adolf Rieth poursuivaient aussi un but pédagogique. Ils voulaient en particulier familiariser les Allemands avec l’art « dégénéré », qui était auparavant proscrit par les nazis. Il est difficile de dire dans quelle mesure ces efforts payèrent. De nombreux visiteurs se sont probablement sentis un peu dépassés par ces œuvres.

Le Kunstgebäude ferma ses portes en mai 1949. Les ambitieux projets d’ouverture d’une Staatsgalerie à Tübingen avortèrent. Après la réforme monétaire, l’argent se faisait rare. Le nombre de visiteurs recula fortement. En outre, l’université réclamait le bâtiment pour l’institut d’archéologie avec une ardeur croissante. Ce n’est qu’en 1971 qu’un lieu d’exposition pour les Beaux-Arts vit le jour à Tübingen, la Kunsthalle. Aujourd’hui, le bâtiment d’archéologie ancienne contient des salles de séminaires et des bureaux administratifs de l’université.

Lukas Kuhn

Pour plus d’informations

Edgar Lersch, « Das Kulturleben in der Stadt Tübingen vom Zusammenbruch bis zur Währungsreform (1945–1948) », in : Zeitschrift für Württembergische Landesgeschichte 43 (1984), p. 327–354.


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11 La Neue Aula

La Neue Aula
La Neue Aula, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
Le gouverneur Guillaume Widmer
Le gouverneur Guillaume Widmer (premier plan à gauche) avec d’autres militaires français devant la Neuen Aula, droits : Schwäbisches Tagblatt
René Cheval, le général Marie-Pierre Koenig et le recteur Theodor Steinbüchel (de gauche à droite) dans la Neue Aula, le 5 juillet 1946, photographie : Rotophot, droits : Archives municipales de Reutlingen
René Cheval, le général Marie-Pierre Koenig et le recteur Theodor Steinbüchel (de gauche à droite) dans la Neue Aula, le 5 juillet 1946, photographie : Rotophot, droits : Archives municipales de Reutlingen

11 La Neue Aula

Geschwister-Scholl-Platz, 72074 Tübingen

La vie académique reprit son activité à partir d’octobre 1945. La Neue Aula était au centre de celle-ci et fut aussi utilisée comme tribunal par les autorités d’occupation.

L’Université de Tübingen fut l’une des premières universités en Allemagne à rouvrir après la guerre. Lors de son allocution dans la salle des fêtes de la Neue Aula, le gouverneur Guillaume Widmer rappela les manquements de la science sous la période national-socialiste. En même temps, il confia une mission politique aux professeurs et enseignants présents : « Le monde a souffert d’une étrange et terrible maladie : une lèpre, dont il convient de le guérir. C’est la tâche, Messieurs, que vous entreprenez. […] L’idéal Démocratique ne saurait s’accomplir sans une éducation. Ici encore c’est l’Université qui sera le guide de ceux qui cherchent. »

Plus de 3000 étudiants purent s’inscrire à l’université au cours du premier semestre d’après-guerre. Un millier de candidats furent refusés. Seule une partie de l’ancien bâtiment universitaire était à disposition, les bibliothèques de l’université avaient été déplacées, et trente enseignants avaient perdu leur habilitation à donner des cours en raison de la politique de dénazification. D’autres enseignants étaient tombés sur le champ de bataille ou avaient été faits prisonniers. Avec le soutien actif du gouvernement militaire français et de son officier de liaison à l’université René Cheval, on réussit bientôt à faire venir à Tübingen plusieurs professeurs renommés, parmi lesquels le philosophe Romano Guardini, le théologien Helmuth Thielicke, le biochimiste Adolf Butenandt et le professeur de pédagogie Eduard Spranger.

Au cœur de la vie académique, qui avait repris son activité, se trouvait la Neue Aula. En novembre 1945, le théologien Karl Barth y créa des remous en attirant l’attention sur la responsabilité collective des Allemands dans le national-socialisme. Grâce à l’aide alimentaire Hoover, les étudiants pouvaient apaiser leur faim gratuitement dans la Neue Aula. Celle-ci était importante aussi pour la ville et pour le Land du Wurtemberg-Hohenzollern : les salles du Sénat servaient pour les délibérations des représentants du gouvernement militaire. Étant donné que le palais de justice était utilisé par les autorités d’occupation, la cour d’appel et la cour des comptes régionales siégèrent également dans la Neue Aula à partir de juin 1946.

La place située devant la Neue Aula fut rebaptisée en août 1945, tout comme environ 70 rues et places de la ville. Le nom « Schollplatz » (plus tard « Geschwister-Scholl-Platz ») devait honorer la résistance menée par le groupe dit de la « Rose blanche », à peine connu à l’époque, et faire figure d’exemple pour les étudiants en matière de courage civique et de conscience démocratique.

Jonathan Schilling et Johannes Großmann

Pour plus d’informations

Manfred Schmid et Volker Schäfer (éd.), Wiedergeburt des Geistes. Die Universität Tübingen im Jahre 1945, Tübingen, Universitätsarchiv, 1985.

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Guillaume Widmer devant la Neue Aula
Guillaume Widmer devant la Neue Aula, détail d’une photo, droits : Schwäbisches Tagblatt

Guillaume Widmer (1906–1968) fut le gouverneur français du Wurtemberg-Hohenzollern de 1945 à 1952. Cet ancien banquier avait servi dans l’armée en Indochine entre 1939 et 1941. Plus tard, il résista activement contre l’occupation allemande. Sous son mandat, Tübingen devint le centre culturel et administratif du Wurtemberg-Hohenzollern. À partir de 1954, il travailla comme fonctionnaire au ministère français de la Défense. (F.R.)


René Cheval, 1946
René Cheval, 1946, détail d’une photo, photographie : Rotophot, droits : Archives municipales de Reutlingen

René Cheval (1918–1986) était un germaniste français. Il arriva à l’âge de 26 ans seulement à Tübingen, en 1945. En tant qu’officier de liaison, il s’occupa de la dénazification de l’université et veilla à donner un nouveau souffle aux échanges académiques. En tant que directeur du Centre d’Études Françaises, il coopéra étroitement avec le séminaire de langues romanes de l’université dès 1948. En 1951, il fut le premier directeur de l’Institut Français de Stuttgart. (M.O./F.R.)


10 Le cimetière français

Ancien cimetière militaire français
Ancien cimetière militaire français, aujourd’hui parking derrière le Kupferbau, printemps 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
Cimetière militaire français, mai 1946
Cimetière militaire français, mai 1946, photographes : frères Metz, droits : Haus der Geschichte Baden-Württemberg

10 Le cimetière français

Gmelinstraße 5A, 72076 Tübingen

Dans les années d’après-guerre, un cimetière militaire français se trouvait derrière le Kupferbau actuel. La plupart des tombes furent finalement transférées en France.

Juste après la fin de la guerre, on installa un cimetière pour les soldats français à côté du cimetière municipal dans la Gmelinstraße. On y enterra d’abord des soldats qui étaient morts avant et après l’invasion de Tübingen. Au cours des semaines et des mois qui suivirent, on continua d’utiliser le cimetière, qui contint bientôt plus de 100 tombes. On y inhuma notamment des soldats marocains et sénégalais des troupes coloniales, mais aussi des travailleurs forcés originaires d’Europe de l’Est et victimes du nazisme. La dernière inhumation connue eut lieu en 1948. Ensuite, jusqu’au début des années 1950, la plupart des corps furent rapatriés dans leur pays d’origine. En 1952, il restait huit tombes d’adultes, pour la plupart de soldats africains, que personne ne s’était occupé de rapatrier. Il y avait en outre une cinquantaine de tombes d’enfants. Le plus souvent, leurs pères étaient des membres des forces d’occupation et leurs mères étaient allemandes. L’administration militaire française n’était pas prête à transférer ces ossements d’enfants en France.

Dès le début des années 1950, l’administration de Tübingen s’intéressa au terrain du cimetière. Elle voulait y construire une école maternelle. L’installation d’un parc ou d’une église protestante était également en discussion. Finalement, ces plans échouèrent car la ville et les forces d’occupation ne parvinrent pas à se mettre d’accord sur l’endroit le plus approprié pour déplacer le cimetière. L’armée française voulait déplacer les sépultures de guerre de toute la région à Tübingen et y installer une sorte de cimetière central français pour le Bade-Wurtemberg. Certes, dans un premier temps, la ville de Tübingen se dit prête à mettre à disposition un espace sur le Bergfriedhof et à prendre en charge les coûts pour le transfert des huit tombes restantes Gmelinstraße. Mais les Français réclamèrent finalement un espace qui accueillerait jusqu’à 250 tombes. Pour l’administration municipale, cela allait trop loin. Elle renonça au projet et se mit à la recherche d’un autre endroit pour l’école maternelle. Sur le terrain entre le Kupferbau et le cimetière de la ville se trouve aujourd’hui un parking.

Lukas Kuhn

Pour plus d’informations

Udo Rauch et Antje Zacharias (dir.), Sieben Jahre Landeshauptstadt. Tübingen und Württemberg-Hohenzollern 1945 bis 1952, Tübingen, Kulturamt, 2002.


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9 L’ancienne clinique gynécologique

L’ancienne clinique gynécologique
L’ancienne clinique gynécologique, automne 2015, photographe : Bernhard Kleeschulte
La clinique gynécologique, 1961, photographes : probablement les frères Metz, droits : Archives municipales de Tübingen
La clinique gynécologique, 1961, photographes : probablement les frères Metz, droits : Archives municipales de Tübingen
Maison de la corporation étudiante Rothenburg, Schlossbergstrasse 23
Maison de la corporation étudiante Rothenburg, Schlossbergstrasse 23, carte postale des frères Metz, droits : Haus der Geschichte Baden-Württemberg

9 L’ancienne clinique gynécologique

Schleichstraße 4–8, 72076 Tübingen

En 1945, de nombreuses femmes violées par des soldats français se firent examiner dans la clinique gynécologique.

De nombreuses Tubingeoises furent violées par des soldats français, en particulier dans les premiers jours qui suivirent l’invasion. Une femme témoigne : « Partout à Tübingen, on entendait des femmes et des jeunes filles crier à l’aide. Nous étions toutes terrifiées. » Beaucoup de femmes se cachèrent durant des jours. Quelques-unes se défendirent courageusement. Le bilan resta malgré tout effrayant. Entre mai et septembre 1945, 977 victimes de violences sexuelles se firent examiner dans la clinique gynécologique de Tübingen dont presque 400 habitantes de la commune. Deux tiers d’entre elles s’étaient fait violer entre le 19 avril et le 8 mai. Ces femmes venaient se faire examiner par peur des maladies vénériennes ou parce qu’elles étaient enceintes. Il est difficile d’estimer le nombre de femmes qui n’ont rien dit ou qui se sont fait examiner ailleurs.

Les violences sexuelles sont un phénomène fréquent en période de guerre, qui s’est produit presque partout en Allemagne lors de l’invasion des Alliés. Des soldats allemands également violèrent des millions de femmes au cours de la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, de nombreux Tubingeois ont perçu cette violence comme étant une caractéristique inhérente aux occupants français et à leurs troupes coloniales. Dans un contexte de censure de la presse, les prophéties apocalyptiques de la propagande national-socialiste, les faits réels et les rumeurs se mêlèrent à l’image caricaturale et raciste du violeur « marocain ». Fait particulièrement révélateur, la couleur de peau des coupables était décisive pour décider si une femme pouvait avorter ou non. Ce critère servait au médecin lorsqu’il prenait une décision au nom des autorités municipales. Ceci a pu inciter les victimes de viol à désigner les soldats coloniaux comme coupables. Quelques « enfants de guerre » furent probablement inhumés dans le cimetière militaire français.

Certes, les violeurs étaient menacés de peine de mort. Mais tant que la guerre n’était pas encore finie et que l’administration militaire n’était pas établie solidement, il était difficile d’attraper les coupables. Pour contenir les actes de violence, les forces d’occupation firent pression pour que soient installées ce que l’on appelait des maisons de tolérance. Des femmes s’y prostituaient pour les soldats d’occupation en principe « sans se sentir forcées ». En France, jusqu’en 1946, les maisons de tolérance étaient encore une pratique courante, régulée par la loi. Elles devaient permettre de contrôler les prostituées et d’éviter que des maladies vénériennes ne se répandent. L’un de ces bordels s’est brièvement trouvé dans la maison de la corporation étudiante Rothenburg sur le Schloßberg. Toutefois, les Tubingeois ne virent pas la présence de ces maisons comme un moyen d’éviter davantage de viols, mais comme une atteinte à leur morale bourgeoise.

Johannes Großmann

Pour plus d’informations

Elke Gaugele, « Nun sollten wir zu spüren bekommen, was Erobertwerden heißt ». Erfahrungen von Frauen im Landkreis Tübingen beim Einmarsch der französischen Besatzungstruppen, in : Tübinger Blätter 82 (1996), p. 28–32.

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